Mardi 8 novembre, 20h00, le Comité C5 (Comité des
Citoyens Contre la Centrale de Cornaux et pour une utilisation responsable
de l'énergie) débutait sa 4ème assemblée
générale publique depuis sa création, le 27
juin 2007. Au menu, une partie statutaire où, tour à
tour, le président, Laurent Suter, le caissier et les vérificatrice
et vérificateur "liquideront" les 6 premiers points
de l'ordre du jour en une petite vingtaine de minutes, tout en réélisant,
dans la foulée, le comité restreint.
La deuxième partie de la soirée est consacrée
aux informations du Comité C5. C'est Mauro Nanini, responsable
de la communication au comité C5, qui prend la parole. Tout
d'abord, il répond à un article paru dans l'Express
du 20 octobre, dans lequel le Groupe E prétend que les centrales
à gaz à cycle combiné n'explosent pas. "Eu
égard aux 5 morts et aux dizaines de blessés dans
l'explosion survenue à la centrale de Middletown (Connecticut/USA)
en février 2010, je ne me serais jamais permis de faire paraître
une telle affirmation!", s'exclame M. Nanini et de conclure
sur ce thème "Si le gaz n'explosait pas, ça
se saurait!".
Il réaffirme ensuite les points essentiels, selon le Comité
C5, afin de solutionner le "casse-tête" énergétique
: premièrement, inciter fortement la population et les entreprises
à économiser l'énergie; deuxièmement,
investir massivement et immédiatement dans les sources d'énergies
renouvelables, et si ces mesures ne devaient par suffire, établir
une planification bien pensée pour l'implantation de centrales
à cogénération ou hybrides. Le gaz ne fait
en aucun cas partie de ce cheminement. Pour clore ce thème,
le responsable de la communication esquisse un délai : "Etant
donné le manque de clarté dans la politique énergétique
de notre pays, nous aurons, peut-être, à parler d'une
centrale à gaz à l'avenir. Sachant qu'une telle structure
se construit en moins de trois ans, nous pouvons au minimum nous
fixer un délai d'une quinzaine d'année avant d'en
parler sérieusement. Il est urgent d'attendre!".
Mauro Nanini, dans son discours, prend l'Allemagne en exemple à
suivre. Ce pays a pris des décisions politique fortes et
aujourd'hui il trône mondialement en tête de l'éolien
et du solaire. Les chiffres sont impressionnants, ces deux technologies
permettent de réaliser un chiffre d'affaires de plus de 20
milliards d'euros par an, ainsi que le maintient de plus de 130'000
places de travail.
L'Allemagne légifère, innove et investit dans les
énergies renouvelables. Et M. Nanini de marquer une comparaison
"Alors que les groupes électriques suisses nous disent
'pas de vent, pas d'énergie éolienne' ou encore 'pas
de soleil, pas d'énergie photovoltaïque', les Allemands,
eux, ont saisi à bras-le-corps le problème du stockage
de l'énergie et ont mis en route la première centrale
hybride avec possibilité de stockage d'énergie, dans
la ville de Prenzlau!".
Pour terminer, l'intervenant relève qu'"avec la
mise en place d'une politique énergétique faite par
des politiciens qui expriment une vraie volonté de changement,
couplée avec les découvertes et innovations qui sortent
des laboratoires de nos EPFs et nos universités, on peut
à coup sûr s'éviter la construction de cette
centrale!".
La troisième partie de l'assemblée générale
est dédiée aux deux invités: M. Jean Frédéric
de Montmollin, député au Grand Conseil neuchâtelois,
pour une prise de température politique, et M. Christophe
Ballif, professeur EPFL et expert en technologie photovoltaïque,
pour un éclairage sur cette technologie.
Selon le député de Montmollin, l'accident nucléaire
survenu à Fukushima a fortement brouillé les cartes
dans la plupart des pays, la Suisse y compris. L'abandon du nucléaire
et les craintes d'une pénurie d'électricité
provoquent deux résultats: d'une part le renforcement de
l'idée d'une période transitoire assurée par
des centrales à gaz et, d'autre part, une plus grande mise
en valeur des énergies renouvelables.
Au niveau de la politique cantonale, la centrale à gaz de
Cornaux fait débat. Après le refus populaire de la
révision de la loi sur l'énergie à fin 2009,
le Grand Conseil se trouve à quelques encablures de proposer
une nouvelle révision de cette loi. Les députés
ont notamment accepté de remettre dans la loi l'article 32a
qui dit "Toute construction de centrale thermoélectrique
à énergie fossile doit faire l'objet d'une autorisation
prise sous la forme d'un décret du Grand Conseil soumis au
referendum populaire facultatif si 35 de ses membres en décident
ainsi."
M. de Montmollin termine en soulignant "Même si cet
article rend plus ardue la construction d'une centrale à
gaz, il sera malgré tout difficile de convaincre la population
neuchâteloise de s'y opposer!".
Après une courte pause qui a permis à la centaine
de personnes présentes de découvrir l'entreprise Swiss-Green
qui est active dans les énergies renouvelables et qui a parrainé
l'assemblée générale, la parole passe au professeur
Ballif.
L'auditoire est rapidement conquis par les mots du professeur,
qui alterne explications, chiffres et humour avec une belle aisance.
Durant tout son exposé, les informations tombent. "En
Suisse, il suffirait de couvrir seulement les toits bien exposés
avec des panneaux photovoltaïques pour fournir 50% de l'électricité
aux Suisses !", affirme-t-il avec chiffres à l'appui
et en précisant que cela est réalisable aujourd'hui
grâce aux énormes développements qui ont été
faits ces dernières années dans cette technologie.
Il constate que depuis la 'prise en main' d'une partie de la production
par la Chine, le prix du m2 des panneaux sont en constante diminution
et que cet effet se fait logiquement sentir sur le prix du courant
solaire qui devient de plus en plus concurrentiel.
Puis il démystifie les pénuries de courant, "Il
n'y aura pas de pénuries, par contre, il est possible
que le courant coûte quelques centimes de plus, car si nous
n'en produisons pas assez pour nos besoins nous devrons en acheter
à l'étranger, mais c'est déjà le cas
aujourd'hui !"
Concernant la centrale à gaz, le professeur Ballif n'exclut
pas qu'on doive en construire une ou deux en Suisse à terme,
mais pas pour remplacer les centrales nucléaires et produire
de l'électricité en ruban comme il semble ce soit
le cas pour Cornaux II, mais plutôt comme appoint, par exemple
à certaines périodes de l'hiver.
Il conclut son exposé en relevant toutes les lenteurs politiques
et administratives auxquelles devront faire face les sources d'énergies
renouvelables, et cite Einstein qui disait "Moi je voudrais
mourir en Suisse car, dans ce pays, tout s'y fait toujours avec
cinquante ans de retard !". Rires et applaudissements
dans la salle.